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Les grandes illusions
16 août 2007

Un papillon au plafonnier #1.

" Je n'ai jamais considéré les papillons si beaux qu'en captivité. Libres, ils témoignent du bleu du ciel et j'ignore si c'est ce bleu qui leur vole crédit tout à fait, mais ils semblent plagier les nuages dans leurs traits les plus évasifs. C'est vrai, les papillons de leurs vivants ne sont qu'une grossière réplique de ce qui ne s'imite pas. A plus forte raison, ils se font l'épitaphe du genre humain tout en leurrant l'éphémère, et l'on se demande s'ils sont un paradoxe terrible ou magnifique. Les beautés angoissantes sont les plus vraies, vous savez.
Je les aime sans ridicule ni contrefaçon, les ailes palpitant comme l'organe. C'est là qu'ils sont les plus véritables, enchaînés à la liberté comme on s'accrocherait à un poteau pour ne plus dériver. C'est là qu'est le tourment : on ne veut pas s'attacher, les papillons alors sont notre répit. Car en a-t-on vraiment envie ? D'être épinglés aux jours comme une vulgaire veine au front ? En soi l'acte de dériver, de se saborder dans un vers ou dans deux verres n'est masochiste qu'à cette fin même que l'on aime le pratiquer et le répéter. Définitivement, si les papillons meurent d'un jour de vie en moins, c'est pour notre conscience uniquement, parce que l'on se dit que c'est formidable de pouvoir se poser, alors même que l'on ignore tout de la crucifixion.
On pourra le répéter, s'ils battent de l'aile dans une boîte en velours, ça n'est que pour tapisser nos craintes, les faire taire un instant. On ne veut pas d'une vie raisonnable même taillée sur mesure dans du velours - où ne va pas se nicher le snobisme - alors on aime vicieusement voir son double de mauvaise foi mourir dans ce qui se dit confortable, cela nous rassure, nous apaise. C'est un mensonge, croyez-moi. Aucune mort n'est confortable.
En vérité les papillons sont beaux dans leurs peurs, dans les nôtres également. Et s'il est terrible de les voir s'arrêter de voler soudain, ça n'a rien d'un infarctus pour l'organe. On se dit qu'on a bien fait, décidément, de ne pas être sage. Car à s'attacher aux jours comme à un saule pleureur, on finit par pleurer et un jour on meurt.
Les papillons finalement ne sont qu'un symbole qui se démultiplie, que l'on use à notre guise. Et, vivotant dans la certitude du libertinage, ils n'en ressemblent que plus à un coeur, un coeur que l'on aurait volé l'autre saison. C'est cela finalement, les papillons sont une vulgaire métaphore de nos petites morts."

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