Tri_et_la_dimension__2

La première fois,
On s'est aimé ;
J'étais froide déjà.
Tu as ri, tu as dit :
« Je suis à ton service,
De porcelaine. »

La première foire,
On s'aimait toujours.
Tu riais, en disant :
« J'ai des chevaux,
Sur la langue. »
Alors j'ai du fermer les yeux
Quand tu les as embrassés,
Mais ce n'était pas grave :
Je trouvais sabot.

On est parti,
Un jour de foi,
Un jour de foire.
On est parti,
Pour une vie de cirque.

La nuit quand j'avais froid
(la nuit est grande à huit clos),
Je me disais, je me disais,
Que j'avais sous mes pas
La paille des éléphants.
Alors rien n'importait moins,
Que le froid,
Que la foi,
Parce que je me disais
Qu'on s'en souviendrait longtemps,
De cette vie de cirque.

Les pieds froids je me disais,
Qu'on s'en souviendrait longtemps,
Avec cette mémoire d'éléphant.
Je me disais, je me disais,
Qu'un coeur ça ne s'oublie pas,
Réellement.

La vérité c'est que notre vie,
N'était pas le cirque que j'imaginais.
Mais je persistais
Et la nuit quand j'avais froid
(la nuit est seule quand le sexe meurt),
Je me disais, je me disais,
Qu'on s'en souviendrait longtemps,
De cette vie de foire,
De nos bétails, de nos batailles.

Les pieds froids je me disais,
Qu'on s'en souviendrait longtemps
De cette habitude, de cette hébétude
Qu'avait nos pieds à être sauvages,
Sous la paille.

Un jour je t'ai trouvé,
Il faisait nuit encore,
Tes pieds étaient sec
Comme de la paille,
Comme l'autre saison.
Un jour je ne t'ai plus trouvé,
Depuis il fait nuit toujours.

Mon clown,
L'inconvénient c'est qu'un jour ou lune,
Tu devais tomber amoureux
D'une autre jongleuse de mots.

Circé en foire (une vie de cirque).

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